Une référence
Au moment où de nouveaux Specialized Turbo Levo plus abordables financièrement débarquent dans les magasins, il était bon de revenir en détail sur cette troisième génération de VTTAE que la marque nous avait présentée il y a bientôt un an. Cette seconde partie de la gamme qui compte désormais deux modèles en aluminium et un carbone comporte, à quelques détails près, les mêmes caractéristiques techniques que celles du Turbo Levo Expert de notre essai… Il nous a donc servi de référence.
Par Chris Caprin
Specialized Turbo Levo Expert Carbon
- Usage All moutain et Enduro
- Roues de 29 pouces AV et 27,5 AR
- Débattement 160 AV/150 AR
- Cadre en carbone FACT
- Reach 452 mm et Stack 626 mm en taille S3, offset (déport de fourche) 44 mm
- Motorisation Turbo Full Power System 2.2 Brose/Specialized 250 watts, 90 Nm
- Batterie Specialized M3 700 Wh
- Console et commande : MasterMind TCU
- Modes d’assistance : 3 (Eco, Trail, Turbo) + Shuttle et assistance à la marche
- Réglages et connectivité : par l’application Mission Control et via la console MasterMind TCU
- Pneus Specialized Butcher Grid T9 29×2.60 et Eliminator Grid T7 27,5×2.60
- 6 tailles (S1, S2, S3, S4, S5, S6)
- Prix du modèle testé : 10 200 €
- Poids vérifié : 22,45 kg (sans pédales, en taille S3)
- Lien : www.specialized.com
Quasiment un an après sa présentation au printemps 2021, il est important de refaire un petit examen détaillé du Turbo Levo de troisième génération. De revenir sur tout ce qui change.
Après nous avoir proposé un modèle en 27,5+ avec des pneus en 3.0, un 27,5 + en 2.8 et, enfin, un 29 pouces avec renfort de cadre asymétrique, cette fois-ci, sur la même base de triangle avant, Specialized nous sert un cocktail “mixed-wheels” en 29/27,5 pouces. Un excellent moyen de bénéficier d’un peu plus d’espace au niveau du moteur en disposant d’une partie arrière de cadre moins compacte et, évidemment, de bases plus courtes (442 mm). C’est ce qui s’appelle jouer sur les deux tableaux : à la fois récupérer davantage de place pour le passage de la roue arrière, tout en proposant un VTTAE plus maniable et joueur.
Dans l’opération, la géométrie du Turbo Levo a changé, avec un tube de selle plus redressé pour une aisance accrue en montée, un triangle avant plus spacieux pour être bien positionné au centre du vélo et un angle de douille de direction un peu plus ouvert.
Géométrie modulable
Comme sur les modèles Stumpjumper EVO, la géométrie est modulable grâce à une coupelle de jeu de direction supplémentaire qui permet de disposer en tout (avec celle d’origine) de trois degrés d’angle de fourche différents entre 63 et 65,5°.
Enfin, du côté des axes de pivot du bras arrière, un Flip-Chip permet également de faire varier la hauteur de boîtier de pédalier de + ou – 6 mm. De quoi régler son vélo comme on le souhaite, et, surtout, en fonction de sa pratique.
Nous avons aussi constaté que la marque américaine a fait un effort particulier sur la protection de ce magnifique cadre en carbone garanti à vie… Grâce à des pièces en caoutchouc souple placées judicieusement aux endroits stratégiques, une majorité des nombreux impacts dus aux divers projections que l’on subit en tout-terrain pourront être évités.
Large choix de taille…
Sur ces nouveaux Turbo Levo Gen3, Specialized présente également le S-Sizing. Pour faire simple, on part du principe qu’il est indispensable de se concentrer sur ce qui est réellement important, à savoir qu’il n’y a pas que la taille du pilote qui compte, mais également ce qu’il attend d’un vélo en fonction de sa pratique. D’où la possibilité d’avoir le choix entre six vraies tailles, avec des petits modèles au reach court, plus compacts et éventuellement plus joueurs, alors que les grands offriront davantage d’espace au vététiste et une stabilité plus importante.
Ainsi, pour quelqu’un qui roule habituellement sur un M, c’est vers un S3 qu’il faudra s’orienter… Mais si, d’aventure, la personne désire un VTTAE plus joueur, elle peut choisir un S2. Tout comme un S4 si elle souhaite bénéficier d’un bike plus stable, plus sécurisant. Grâce à ces six tailles différentes et après essai préalable, on est assuré d’avoir le vrai vélo qui convient à son style. Mais également – selon sa taille – la possibilité de disposer d’un vrai S et d’un vrai XXL au sein de la gamme.
Composants
Chez Specialized, avec le Turbo Levo Expert Carbon, on fait dans le très soigné en termes d’équipement et d’accessoires. Ainsi, côté transmission et freinage, on trouve du Sram XO1 et des Code RS 4 pistons avec disques de 200 mm.
Les composants Specialized (potence de 50 mm, cintre de 780 mm), tout comme le pédalier Praxis (32 dents et manivelles de 160 mm), sont également à la hauteur, alors que pour la selle, on dispose d’une Specialized Bridge plutôt bien adaptée à la pratique du VTTAE sportif. Elle prend place sur une tige de selle X-Fusion Manic de 150 mm de débattement, elle aussi parfaitement en phase avec le programme du vélo.
Du côté des roues, on a des Roval Traverse en 30 mm entre crochets montées avec des pneus Specialized Butcher Grid Trail T9 29×2.60 à l’avant et Eliminator Grid Trail T7 à l’arrière… Le choix de la polyvalence.
Enfin, petite nouveauté : pour les poignées caoutchouc, Specialized fait désormais confiance à Deity.
Suspensions
Concernant le débattement des suspensions, avec 160 mm à l’avant et 150 à l’arrière, il est à la fois suffisant pour encaisser la plupart des chocs et offrir une bonne motricité sans pour autant perdre trop d’efficacité au pédalage. En effet, grâce à de nouvelles biellettes, un travail sur la cinématique et des réglages de l’amortisseur spécifiques aux VTTAE, les ingénieurs se sont évertués à préserver un certain rendement, tout en proposant une absorption des différents impacts digne d’un vélo possédant davantage de débattement.
Il est vrai qu’avec une fourche Fox 38 Performance Elite et un amortisseur Fox X2 Performance, si le niveau de qualité de l’ensemble touche à la perfection, on se dit que le poids supplémentaire et la sensibilité de l’amorto, eux, pourraient venir plomber légèrement le dynamisme du vélo… Pourtant, contrairement à ce que j’ai déjà pu vérifier sur d’autres marques, avec le nouveau Turbo Levo, ça n’a vraiment pas l’air d’être le cas. Mais on en reparlera sur le terrain.
En attendant, en ce qui me concerne, voici les réglages que j’ai validés pour un pilote de 70 kilos.
Fourche Fox 38 Performance Elite Grip2 170 :
• 80 psi en pression d’air et deux tokens dans le plongeur gauche pour un Sag entre 25 et 30 %.
• Compression basses vitesses : – 8 du plus fermé (sur 16 clics)
• Compression hautes vitesses : – 5 du plus fermé (sur 8 clics)
• Rebond basses vitesses : – 10 du plus fermé (sur 16 clics)
• Rebond hautes vitesses : – 6 du plus fermé (sur 8 clics)
Amortisseur Fox Float X2 Performance Elite 160 :
• 160 psi de pression d’air pour un Sag de 30 %.
• Compression basses vitesses : – 8 du plus fermé (sur 16 clics)
• Compression hautes vitesses : – 6 du plus fermé (sur 8 clics)
• Rebond hautes vitesses : – 5 du plus fermé (sur 8 clics)…
Moteur et batterie
Si nous avons toujours affaire à une base de moteur Brose Drive S Mag 2.1, des efforts ont été fournis pour offrir un comportement encore plus naturel au pédalage, de même qu’une fiabilité accrue, grâce – entre autres – à une courroie de transmission plus robuste, une personnalisation des réglages de puissance et de couple, une cartographie qui adoucit la manière dont la puissance est délivrée et une nouvelle trappe au niveau de la prise de charge qui possède, non plus un seul, mais trois joints d’étanchéité différents. En ce qui concerne la batterie totalement intégrée et démontable, on retrouve évidemment le modèle Turbo Technology de 700 Wh qui donnait déjà toute satisfaction aux utilisateurs du Levo Gen2.
Et puis enfin, il y a la nouvelle console MasterMind Turbo Control Unit. C’est l’accessoire que l’on attendait, qui vous permet d’être connecté visuellement avec le moteur, la batterie et tout ce qui tourne autour de l’électronique. Placé idéalement sur le dessus du top tube (exactement au même endroit et dans le même espace que l’ancienne console minimaliste du Gen2), le MasterMind TCU vous donne toutes les informations et données dont vous avez besoin (horloge, vitesse, moyenne, niveau de batterie au pourcent près, degré d’assistance, dénivelé, utilisation de la puissance), tout en vous offrant la possibilité d’accéder à tout un tas d’informations et à de nombreux réglages du vélo sur le terrain.
Honnêtement, c’est certainement le système le plus pratique, le mieux intégré et le plus protégé que j’ai eu l’occasion d’utiliser. D’ailleurs, il y a fort à parier que cela deviendra un classique sur les VTTAE d’ici quelques années… Rocky Mountain et Giant ont déjà franchi le pas et à mon avis, les autres marques devraient suivre…
Connectivité
Avec le MasterMind couplé à l’application Mission Control, vous disposez carrément d’un mini-ordinateur de bord. Pour modifier les paramètres, le pourcentage d’assistance de chaque mode et choisir les différentes informations qui composent les trois pages du TCU, il est nécessaire de passer par votre smartphone… En revanche, pour naviguer sur l’écran de contrôle, il faut juste se servir du bouton F1 de la commande, alors que pour remettre à zéro les informations (temps de roulage, kilométrage partiel, dénivelé + ou –), il suffit d’appuyer deux secondes sur le bouton moins… Plus simple, tu peux pas !
Une fois que vous avez choisi et sélectionné le vélo, puis que celui-ci est connecté, via Mission Control, les comptes liés vous permettent de vous rendre sur Strava ou Komoot. Il est recommandé de régler l’application pour qu’elle suive automatiquement vos sorties, y compris lorsqu’elle n’est pas activée sur le smartphone. En cas de problème, n’hésitez pas à appuyer sur Aide pour accéder directement au guide d’assistance complet de l’appli.
Sur le terrain
Prise en main
Comme d’habitude, dès le départ, j’ai choisi de rouler de la manière la plus “neutre” qui soit, c’est-à-dire, avec l’angle de fourche en position standard, la hauteur du boîtier de pédalier en position “High” et juste un réglage basique du Sag des suspensions. C’est ainsi que sur mon taille S3, je me suis senti idéalement posé… comme c’est d’ailleurs très souvent le cas sur les Specialized.
Avec une potence de 50 mm, je suis bien assis au centre du vélo, calé entre les deux roues. Et ce qui est surprenant, c’est que j’ai presque l’impression de me retrouver sur l’ancien modèle avec ses roues de 29 pouces, alors que c’est bien une 27 et demi que l’on trouve à l’arrière. Le vélo reste stable, précis et confortable, tout en étant peut-être un peu plus dynamique sous le coup de pédale.
En tout cas, l’ensemble est particulièrement homogène et même la batterie de 700 Wh ne change en rien le comportement du Levo. Il est toujours aussi facile à mettre sur la roue arrière, que ce soit en pédalant ou simplement, debout, en tirant sur le guidon. Bref, tout cela est vraiment de bon augure !
Comportement du moteur
Ceux qui aimaient le Brose/Specialized 2.0 ne seront ni déçus, ni dépaysés par les quelques petites modifications apportées sur les moteurs qui équipent les Turbo Levo 2022. En effet, son côté silencieux, gorgé de couple et très naturel au pédalage n’a pas disparu, bien au contraire. En revanche, on note que le spectre qui permet de trouver l’assistance adéquate en fonction du terrain rencontré est encore plus large. Certes, il est toujours nécessaire de chercher un minimum la bonne cadence de pédalage pour optimiser les performances du moteur, tout en s’efforçant de réduire le plus possible la consommation d’énergie, mais cela se fait encore plus facilement.
Et une fois que l’on a pris l’habitude de gérer les bons braquets et que l’on a compris le fonctionnement du moteur – ce qui n’est pas difficile –, on apprécie l’efficacité incroyable du Brose/Specialized. Car même si le bloc propulseur annonce une très forte puissance sur le papier, sur le terrain, la manière dont elle est distillée rend le vélo vraiment facile à piloter… Surtout une fois les paramètres réglés en fonction de vos envies et de votre pratique.
A partir de là, le couple avantageux et la progressivité avec laquelle l’assistance arrive font du Turbo Levo un “Expert” du franchissement en montée. Et cela, même avec une roue arrière de 27 et demi souvent un peu moins efficace quand ça monte que quand ça descend ! Eh bien là, en tout cas, par rapport à l’ancien modèle en 29 pouces, ce n’est pas moins bien. Au contraire, le dynamisme supplémentaire lié à la présence d’une roue de diamètre inférieur n’altère en aucune façon la motricité, la précision et le confort du Levo Gen3. Impressionnant.
Comment ça se règle
Pour modifier les paramètres dans Mission Control, il suffit d’appuyer sur la touche Réglages. Sélectionnez le mode sur lequel vous souhaitez intervenir (Eco, Trail Turbo) et ensuite, il n’y a plus qu’à faire glisser le curseur de l’assistance ou de puissance max vers le niveau de pourcentage désiré. Plus la puissance max est élevée, plus il est facile d’atteindre rapidement l’assistance maximum dans le mode choisi. A l’inverse, plus on la baisse, plus on doit forcer au pédalage pour y arriver. De ce fait, un pourcentage de puissance max réduit est la meilleure solution pour préserver l’autonomie de la batterie.
Sur les Levo et Kenevo, il est aussi possible d’ajuster la réponse à l’accélération par paliers de 20 %. Dans ce cas, plus le pourcentage est bas, moins le moteur est violent, ce qui peut être intéressant pour disposer d’un maximum d’adhérence ou simplement éviter d’être surpris par une assistance qui vous propulse trop rapidement à l’assaut des obstacles sur un sentier.
En revanche, plus on se rapproche des 100 %, plus on dispose d’un moteur vif et dynamique, qui, si l’on parvient à le maîtriser, permet de grimper les pentes à plus grande vitesse.
Enfin, si vous êtes du genre cachotier avec vos amis riders, il existe un mode “Furtif”, qui permet d’éteindre les diodes de la console et le bip qui accompagne les changements de mode… Ainsi, personne ne sait sur lequel vous êtes, ni quand vous décidez d’en changer !
Suite aux heures passées récemment sur la motorisation Turbo Full Power System 2.2 et en fonction de mon poids (70 kg) et de ma pratique, voici les réglages de paramètres que je préconise pour une utilisation sportive et technique en montée et en franchissement :
Paramètres :
• Assistance : Eco 40 %, Trail 70 % et Turbo 100 %
• Puissance max : Eco 50 %, Trail 100 % et Turbo 100 %
• Réponse à l’accélération : 40 %
Quant au curseur “Shuttle” – qui monte de 0 à 100 % par paliers de 20 également – il offre la possibilité de monter une longue bosse difficile à une très bonne cadence sans pour autant devoir appuyer fort sur les pédales… Presqu’en tournant les jambes sans effort. Comme pour rejoindre facilement le départ d’une spéciale ou d’une descente permanente, par exemple.
Une fois vos réglages préférés validés, il suffit d’appuyer sur le logo + pour enregistrer les diverses modifications que vous venez de faire… Il est toujours possible de revenir aux paramétrages de base en cliquant sur “Réglages par défaut”.
Sachez cependant qu’il n’y a pas de “mauvais réglages” et qu’il est important d’essayer plusieurs solutions pour trouver celle qui vous convient le mieux.
Autonomie
Connaissant bien le Levo Gen2 et appréciant vraiment son côté peu énergivore, j’attendais beaucoup de voir ce qu’allait donner ce nouveau modèle au niveau de l’autonomie. Et j’avoue ne pas avoir été déçu… Car si l’ensemble du vélo a progressé et évolué de manière modérée mais significative, en ce qui concerne la consommation, avec une batterie de 700 Wh, un VTTAE de 22,5 kg et une motorisation efficace qui n’a rien perdu de ses nombreuses qualités, Specialized conserve son statut de référence lorsque l’on parle du ratio consommation/performance.
Pour des sorties sportives en tout-terrain technique, un pilote de 70 kilos et en utilisant à 35 % le mode Eco, 55 % le mode Trail et 10 % le Turbo, en ce qui me concerne, j’ai pu compter sur 65 km de roulage et 1 380 m de dénivelé positif.
Bien sûr, en utilisant plus souvent un bon Eco et en privilégiant les parcours un peu plus roulants, il est possible de gagner une petite dizaine de kilomètres et autour de 200 m de D+… Avec une batterie de 700 Wh, ça reste carrément dans le coup et en termes d’autonomie, ça place le Turbo Levo Gen3 au sommet de la hiérarchie des VTTAE sportifs.
Précisons aussi que lorsque l’on arrive sur la fin de la batterie, entre 10 et 15 %, le moteur n’offre plus tout à fait la puissance habituelle. Et ensuite, en-dessous de 10 %, ça baisse encore en intensité, mais avec la possibilité tout de même d’obtenir de quoi monter correctement en Trail ou en Turbo s’il le faut. Mais attention, ça descend vite ! Après, à partir de 3 %, le chiffre clignote sur la console, l’assistance s’arrête d’un coup et il faut terminer à la pédale… Heureusement, avec le Levo, quelques kilomètres sans assistance ne sont jamais vraiment un problème tellement il pédale bien moteur coupé.
À la montée
Même s’il s’en sort avec les honneurs dans tous les cas de figure, c’est forcément en montée que l’ensemble moteur/partie-cycle du Turbo Levo révèle tout son potentiel… L’accord est parfait et permet de se sortir de quasiment tous les pièges – y compris en allant chercher des sentiers très techniques avec du franchissement et de la pente sérieuse.
En fait, par rapport à un grand nombre de VTTAE concurrents, le couple extrêmement généreux du Brose/Specialized allié à l’excellente répartition des masses et à une motricité impressionnante donne au pilote l’impression d’être nettement plus à l’aise sur le même passage difficile. Je le dis souvent, mais un VTT à assistance électrique ne se résume pas à l’aide qu’une motorisation peut apporter. Non, en tout-terrain, il y a plusieurs paramètres qui rentrent en ligne de compte et l’important, ce sont bien les sensations que l’on a en action, pas les chiffres que l’on trouve dans les fiches techniques !
Comme le Lapierre GLP2, c’est un vélo dont l’accord exceptionnel entre le moteur, la géométrie et le système de suspension offre les moyens de se surpasser. De moins se battre avec la machine pour dominer le terrain et donc de dépenser moins d’énergie inutile. Certainement les deux VTTAE carbone en roues dépareillées 29/27,5 les plus réussis, les plus confortables et les plus faciles à maîtriser du marché… Avec peut-être un petit côté encore plus naturel dans le pédalage et la précision en montée en ce qui concerne le Spé. C’est en tout cas ce que le comportement sur le terrain m’a permis de valider.
On note aussi qu’avec un bel espace au niveau du tube supérieur, un tube de selle assez droit et des bases plus courtes, le comportement du Levo a évolué dans le bon sens par rapport à l’ancien modèle en 29 pouces. A savoir qu’il est nettement plus nerveux dans son comportement, sans pour autant perdre son côté sécurisant. Et en allant chercher des montées de plus en plus raides, techniques et sinueuses, j’ai pu constater la facilité avec laquelle ce vélo pouvait gravir les pentes et virer dans un mouchoir de poche, en passant d’une épingle à l’autre avec une facilité désarmante.
Après avoir effectué pas loin de 800 km au guidon du Turbo Levo Expert Carbon, je peux désormais affirmer qu’en termes de motricité, de vélocité ou de maniabilité, le Turbo Levo Gen3 est en net progrès par rapport à la version précédente…
Notez aussi que pour ceux qui préfèrent un VTT plus vif en montée, comme pour ceux qui veulent éventuellement plus de stabilité en descente, il est toujours possible de diminuer ou d’augmenter l’angle de fourche grâce à la cuvette réversible fournie avec le bike. C’est assez vite fait et ça change le caractère du Levo de manière subtile.
Dans le même registre, pour ceux qui privilégient l’efficacité en montée, on peut conseiller également de jouer sur la position du Flip-Chip en le mettant sur “High“, ce qui a pour incidence de relever légèrement le boîtier de pédalier (+ 6 mm). Non seulement les manivelles auront encore moins de risque de toucher les obstacles au sol (bien qu’avec des modèles en 160, ça ne soit pas vraiment un problème non plus en positon “Low“), mais on peut dire que cela apporte aussi un petit plus au niveau de l’aisance lorsque la pente est raide et jalonnée de nombreux petits franchissements. Ainsi, le comportement du vélo a tendance à être encore plus nerveux, sans pour autant perdre réellement en confort et en stabilité.
Personnellement, j’ajouterai que c’est avec la cuvette d’origine et le boîtier en position la plus haute que j’ai préféré ce nouveau Levo en montée… Dans cette configuration, la motricité, le confort et les capacités en franchissement sont carrément impressionnants. Comme je l’ai déjà dit, on a vraiment l’impression que le vélo aide à passer les obstacles là où d’autres butent, ou tout du moins obligent à se battre davantage en affrontant les difficultés.
En descente
Quand la pente s’inverse et que la pratique s’oriente plus “Gravity” que all mountain, vous aurez compris qu’il pourra être judicieux de passer sur la position “Low“du Flip-Chip et, éventuellement, de mettre encore un peu plus d’angle à la fourche en passant à 63°. Mais honnêtement, avec la cuvette d’origine à 64,5°, en descente, le vélo est déjà sacrément efficace. Dans la plupart des cas, en utilisation rando sportive et enduro light, il n’est pas utile de toucher à quoi que ce soit. Il y a largement de quoi se faire plaisir, tout en conservant un vélo dynamique, stable, très agréable en descente et toujours aussi polyvalent.
D’ailleurs, si je compare le Turbo Levo à quelques modèles d’enduro avec un peu plus de débattement testés récemment, au niveau comportement, si l’on s’en tient à des sentiers techniques, cassants et moyennement rapides, j’ai préféré le Spé… De même, en l’emmenant dans mes spéciales assez sinueuses, avec beaucoup de pente et des passages sérieusement engagés, j’ai adoré son côté sain, sécurisant, à la fois stable, vif et très maniable. Encore une fois, on pense au GLP2 !
En gros, il n’y a qu’en bike park ou sur des tracés rapides et défoncés à la montagne que le vélo est légèrement en retrait. Mais est-ce vraiment son programme ? Non, je ne crois pas. Et puis avec la cuvette en mode 63°, on a déjà un sacré engin en descente, croyez-moi…
De plus, pour une utilisation polyvalente, avec le Butcher Grid T9 en 2.60 à l’avant et l’Eliminator Grid T7 en 2.60 à l’arrière, la tenue de piste est excellente et le grip latéral permet de prendre de l’angle sans trop se poser de questions… En effet, pour la majorité des pratiquants, cette roue avant en 29 pouces avec un pneu légèrement plus volumineux est juste l’assurance de survoler les petits obstacles encore plus facilement et de disposer d’un confort supérieur.
Dans le même registre, j’ai pu aussi vérifier que sur un VTTAE, même en 160 mm de débattement seulement, une fourche de 38 de diamètre, c’est tout à fait justifié. Bien sûr, ça rajoute un peu de poids, mais globalement, il y a nettement plus d’avantages que d’inconvénients. Dans les parties cassantes, sur les marches abordées à grande vitesse ou quand on arrive dans les trous d’une zone de freinage, avec un bike de plus de 20 kilos, c’est forcément un plus. Sans parler du poids du pilote… Plus il augmente, plus ça s’impose !
En tout cas, sur le Levo Gen3, ça ne change rien, bien au contraire, et comme sur le modèle précédent, il est toujours aussi facile de lever la roue avant en tirant simplement sur le guidon. Et cela sans s’aider d’un coup de pédale. L’idéal pour tirer un petit bunny-up ou un manual.
Sans chercher à tout prix à gagner du poids et avec une batterie de 700 Wh, le Spé reste donc malgré tout dans le trio de tête des VTTAE les plus faciles à mettre sur la roue arrière, aux côtés des Rocky Mountain Powerplay et Lapierre GLP2. Et puis, dans les passages vraiment raides et sinueux en descente, on apprécie encore davantage la roue arrière en 27 et demi. On place le vélo un peu plus facilement au bon endroit et si l’on doit vraiment passer derrière la selle dans le très pentu, le petit espace supplémentaire est vraiment le bienvenu.
Bref, on n’est pas loin du sans-faute !
Points forts / points faibles
Points forts
+ Polyvalence
+ Confort
+ Sensation de sécurité
+ Rendement
+ Vivacité
+ Comportement du moteur
+ Autonomie
Point faible
– Prix
– Trappe de recharge fragile
Qu’en penser ?
Ce qui ressort en premier de ce test poussé, c’est qu’en privilégiant un changement dans la continuité et en jouant davantage sur la fiabilité que sur le gain de poids à tout prix, Specialized a pourtant réussi à améliorer le comportement, la finition et la polyvalence de son Turbo Levo. D’en faire un VTTAE un peu plus sportif, plus fun et dynamique, mais jamais exigeant pour autant.
J’avoue aussi que même si j’avais un faible pour l’ancien modèle en 29 pouces, le montage avec roues dépareillées (29 /27,5) m’a semblé finalement apporter plus d’avantages que d’inconvénients. Même sur un cadre en carbone plus rigide, le confort reste bien présent et la tenue de cap excellente.
Et puis la base du moteur Brose Drive S Mag 2.1 associée au savoir-faire de Specialized est toujours aussi agréable, avec son côté silencieux, son couple exceptionnel, son pédalage naturel et son confort d’utilisation.
Enfin, il est évident que le Turbo Levo Gen3 a nettement gagné en caractère. Plus sportif, il garde néanmoins toujours ce côté facile et rassurant que les inconditionnels de la marque apprécient tant. Comme je l’avais évoqué il y a bientôt un an lors de la présentation, ce VTTAE possède tous les atouts pour convaincre une nouvelle frange de pratiquants… sans pour autant dérouter les clients de longue date. Avec le recul et beaucoup plus d’heures passées sur le vélo, je confirme donc qu’avec ce nouveau Levo, Specialized a carrément réussi son pari !
Vis-à-vis de la concurrence ?
Parmi les modèles 2022 que j’ai eu l’occasion d’essayer récemment, j’en vois trois qui sortent particulièrement du lot…
Il y a déjà le Rocky Mountain Instinct Powerplay Carbon 70 à 8 699 euros. Extrêmement polyvalent, très efficace, mais aussi vraiment agréable à piloter, le nouveau Powerplay en 140/150 n’a pas à rougir face au Specialized. Que ce soit au niveau du comportement comme du côté de l’autonomie.
On peut citer également le Santa Cruz Heckler C XT à 9 999 euros. Très polyvalent aussi et équipé d’un moteur Shimano EP8 presque aussi sympa que le Brose/Specialized, le Santa Cruz a su me séduire lors d’une récente prise en main… Je l’ai cependant senti un poil moins vif et maniable que le Turbo Levo
Enfin, arrivé récemment dans mon atelier, je me dois de rajouter le Scott Patron eRide Tuned à 8 999 euros. Un VTTAE très polyvalent lui aussi et en parfait accord avec son moteur Bosch Smart System 2022. Un peu moins confortable peut-être que le Levo, mais sacrément dynamique lui aussi !
Et puis bien sûr, comme je l’ai cité plusieurs fois dans l’essai, impossible de ne pas mentionner à nouveau le Lapierre GLP2 Team à 7 999 euros. Certainement le vélo qui se rapproche le plus de l’esprit et du comportement du Turbo Levo… En nettement moins cher, ça va de soi !
La gamme
Celle-ci se compose désormais de six modèles.
Quatre en carbone, avec le Comp à 8 500 euros, l’Expert de notre essai à 10 200 euros, le Pro à 12 000 euros et enfin le fameux S-Works à 15 000 (!) euros.
Et puis à un tarif, certes encore élevé, mais plus raisonnable quand même, on trouve deux versions avec cadre en aluminium : le Turbo Comp Alloy à 7 250 euros et le premier prix, le Levo Alloy à 6 300 euros.
Notez que tous les Turbo Levo sont équipés d’une batterie de 700 Wh – sauf le Levo Alloy qui conserve, lui, une 500 Wh seulement…