Made in China !
Ce n’est pas tous les jours que l’on a l’occasion de découvrir une nouvelle marque qui décide de s’impliquer dans la fabrication d’une motorisation spécifique pour le VTTAE. La dernière en date s’appelle Ananda et nous vient de Shanghai. Alors quand Thomas Lecocq, responsable du Service Station pour le fabricant chinois en France, m’a proposé de me laisser un prototype à disposition afin que je lui donne mes impressions, j’ai tout de suite accepté ! En plus de la présentation de la marque, vous aurez donc droit à un test en exclusivité du moteur M230 eMTB made in China que l’on pourrait bien retrouver prochainement sur certains VTTAE du marché… Intéressant.
Par Chris Caprin – Photos : Chris Caprin et Fagerbé
Ananda M230 eMTB
- Poids : entre 2,65 et 2,8 kg
- Carters : magnésium
- Puissance : 250 watts
- Assistance maxi : 680 watts en crête
- Couple maxi : 80 Nm
- Modes d’assistance : 5 (Eco, Tour, Sport, Turbo et Boost)
- Assistance à la marche : oui
- Batterie : B20 500 Wh (2,9 kg)
- Console et commande : au guidon avec mini écran couleur de 1,14 pouces
- Application pour réglages moteur : à venir
- Lien : www.ananda.com.cn
Ananda est une entreprise chinoise créée en 2011 et spécialisée dans la micro-mobilité, la mobilité urbaine électrique, la motorisation, la connectique et les écrans HMI. Le quartier général se situe à Shanghai et la marque possède une équipe en interne dédiée à la recherche et au développement, ainsi que des outils de fabrication 100 % Ananda.
Le constructeur propose une large gamme de produits dédiés à différents secteurs, comme celui des scooters et des motos électriques pour lesquels il fournit moteurs, consoles et écrans, alors que pour le marché du cycle, il fabrique à la fois des moteurs centraux, des moteurs dans le moyeu, des capteurs de puissance, des écrans et des systèmes de connectique complets.Depuis sa création, la société est en expansion régulière et en 2022, 5 millions d’unités ont été vendues sur le marché chinois, essentiellement des moteurs pour scooter électrique qu’on ne trouve qu’en Asie, le cœur de l’activité d’Ananda. Tous les produits proposés par la marque sont fabriqués en interne dans leurs propres usines, y compris les cartes mères… Les volumes atteints permettant de négocier les prix et de contenir les coûts de fabrication.
Nouveaux objectifs
Depuis quelques années, l’activité se resserre autour du vélo électrique et de ses différents secteurs en proposant des systèmes complets, allant du VTT à l’urbain, en passant par le gravel. Et si, pour le moment, la clientèle ciblée est le fabricant de vélo à assistance électrique qui affiche des tarifs raisonnables, la volonté de monter en gamme est clairement affichée. En gros, le but à court terme est de créer une alternative fiable, performante et abordable face aux géants actuels que sont Bosch et Shimano, cela afin de se positionner rapidement comme une sorte de “SR Suntour” de la motorisation.
Pour cela, Ananda attache extrêmement d’importance au service et ainsi, la première étape a été de créer une entité aux Pays-Bas dès 2013. Trois ans plus tard, le constructeur décide d’implanter une usine d’assemblage en Hongrie, avant de lancer ensuite la mise en place de Service Station dont le rôle est d’assurer un SAV solide, mais aussi de tisser des liens solides entre chefs de produits, fabricants et réseau de revendeurs.
Tout cela afin de permettre davantage de réactivité et d’écoute face aux utilisateurs et, ainsi, d’améliorer les produits, avec encore plus de tests en laboratoire, mais aussi sur les terrains différents et variés que l’on peut trouver en Europe.
Une ouverture d’esprit qui montre un réel désir d’apprendre et de mieux cerner les besoins du marché. Pour cela, Ananda s’entoure de personnes dotées de grandes compétences afin de toujours progresser et aller de l’avant, tout en restant à l’écoute des clients pour s’adapter à une demande de plus en plus pointue en proposant des technologies qui évoluent et tendent vers des produits de plus en plus aboutis… Comme, par exemple, l’Ananda App qui permettra bientôt de contrôler les paramètres de l’assistance, mais aussi le développement de moteurs encore plus compacts ou de nouveaux écrans plus ergonomiques et mieux intégrés.
Ananda, les chiffres et les dates clés…
- 2011, l’année de création de l’entreprise à Shanghai.
- 8 le nombre de ligne de productions.
- 2013 : Ananda ouvre une succursale aux Pays-Bas.
- 200 le nombre de machines automatiques en fonction.
- 2016 : ouverture de l’usine de production à Jiangsu.
- 2017 : lancement du premier moteur central et conquête du marché européen.
- 400 000 moteurs centraux vendus dans le monde en 2022.
- 250 000 moteurs moyeux vendus en Europe en 2022.
- 2021 : ouverture d’une usine d’assemblage en Hongrie afin de réduire les coûts de productions de l’impact carbone.
- 5 c’est en millions le nombres de moteurs vendus en Chine en 2022.
- 2022 : le chiffre d’affaires dépasse le milliard pour la deuxième année consécutive. Ouverture de deux Service Station en Europe (Italie et France).
- + de 100 le nombre de brevets déposés par Ananda à ce jour.
- 800 le nombre d’employés aujourd’hui, dont 60 rien que pour la recherche et le développement.
Sur le terrain
L’historique, la progression rapide de la compagnie et les caractéristiques techniques de la motorisation, c’est bien, mais ce qui nous intéresse le plus, c’est évidemment le comportement du moteur sur le terrain. Et le premier point important à souligner dans cet essai, c’est la qualité du châssis sur lequel est monté le petit moulin, qui met réellement en valeur les performances du groupe d’assistance Ananda et permet ainsi de se faire une véritable idée de la valeur du produit.
Car pour promouvoir de manière efficace son moteur MC230 eMTB, la marque chinoise n’a pas lésiné sur les moyens en décidant carrément de fabriquer son propre cadre all mountain tout-suspendu en 160 mm de débattement, équipé de roues de 29 pouces… On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même, dit-on, et en tout cas, il s’avère que Lance (Jliang Xunayu), l’ingénieur responsable du projet, a parfaitement relevé le défi. Le vélo est sain, pas trop lourd pour un aluminium équipé d’une batterie de 500 Wh (22 kg), avec une géométrie aussi sympa en montée qu’en descente. Et comme les composants choisis restent très abordables, on a au final un VTTAE entre le light et le full power, qui, si Ananda décidait de le commercialiser (ce qui n’est pas d’actualité pour l’instant), pourrait faire très mal au niveau du rapport qualité/prix !
Mais Ananda est une marque de moteurs, pas de vélos, et c’est avant tout pour bénéficier d’un support crédible et faire tester ses motorisations aux clients potentiels (les fabricants) dans les meilleures conditions possibles que les cadres ont été développés. Néanmoins, la qualité du produit inspire le respect. Voilà, j’estime qu’il fallait le dire – surtout à une époque où les tarifs n’en finissent pas de s’envoler… pour des modèles pas forcément plus agréables à rouler en vrai tout-terrain.
Mais je m’égare, j’extrapole, je me disperse, alors revenons plutôt au cœur du sujet, à savoir le comportement du moteur. Et après une dizaine de kilomètres seulement, je me suis rendu compte à quel genre de motorisation j’avais affaire… Pourtant, n’ayant pas d’informations particulières sur le type d’assistance du MC230 eMTB, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre et j’ai découvert tout ça en direct sur le terrain.
Mais voilà, avec l’habitude que j’ai de tester énormément de motorisations différentes depuis des années, j’ai rapidement compris comment fonctionnait l’Ananda. En fait, on est clairement entre une assistance légère et du full power. Quelque part entre le BH 2EXMAG et le Fazua Ride 60 (sans l’Extra Power), c’est-à-dire quelque chose de doux avec quand même du couple, mais plus à l’aise sur les chemins roulants que dans les sentiers très techniques. Sur le plat et les faux-plats, en Tour ou même en Eco, on a la sensation d’en avoir largement, avec un démarrage progressif et, ensuite, un soutien solide qui ne nécessite pas forcément de trop mouliner ni d’appuyer fort sur les pédales. Avec parfois tendance à en donner trop quand ce n’est pas utile et pas assez quand on en a besoin !
En revanche, lorsque ça monte plus raide, surtout d’un coup, là, il faut très rapidement changer de mode, passer en Sport ou en Turbo et monter sur les grands pignons pour obtenir de quoi gravir sans encombre. En gros, il y a un manque de puissance à l’accélération dès que l’on rencontre des obstacles un peu plus conséquents… L’assistance n’est pas assez réactive en fonction de l’inclinaison de la pente et, à ce titre, on est parfois un peu surpris face à une marche ou un bon coup de cul. Heureusement, en Boost, sur le grand pignon, il y a moyen de s’attaquer quand même à du très raide et, finalement, avec l’aide d’un châssis réussi, on arrive à s’en sortir plutôt pas mal.
Ce qui m’a moins plu…
Comme je l’ai évoqué plus haut, j’ai noté, par exemple, un manque de réactivité de l’assistance lorsque l’on appuie fort sur la pédale, pour franchir une marche, par exemple. Il faut vraiment anticiper si l’on ne veut pas se bloquer et dans les portions à la fois raides et techniques, ça peut poser un problème.
Toujours au rayon des petits défauts, j’ai trouvé que si l’assistance avait un temps de réponse un peu long avant de se lancer, elle mettait en revanche beaucoup trop longtemps pour s’arrêter. C’est de l’ordre de 4 secondes (quand même !), alors que l’on apprécierait davantage si le moteur stoppait son aide après seulement 2 petites secondes. Il est clair que là, on est loin de l’Extended Boost d’un Bosch, bien plus dynamique et utile en donnant exactement ce dont on a besoin – quand on en a vraiment besoin –, pendant moins d’une seconde !
Enfin, l’absence (ou le manque d’efficacité flagrant) d’un capteur de pente se fait cruellement sentir au moment de grimper les côtes les plus raides. Même si le couple semble suffisant, on est obligé de changer de braquet pour mouliner davantage si l’on veut poursuivre une ascension sans s’arrêter. Et en perdant de la vitesse, on risque forcément de se bloquer plus souvent sur les obstacles…
Autrement, on comprend vite que ce qu’il manque, c’est avant tout une application qui permettrait de changer les paramètres et, ainsi, d’avoir la possibilité de se faire un moteur qui correspond à son pédalage et à sa pratique. Mais tout cela ne devrait pas tarder à être disponible et à partir de là, l’assistance pourrait se montrer nettement plus adaptée au tout-terrain technique – dans l’esprit d’un Fazua Ride 60. En plus bruyant, néanmoins, car le MC230 eMTB n’est pas le plus silencieux des moteurs que j’ai eu l’occasion de tester. Attention, ce n’est pas non plus catastrophique, mais à pleine charge, on entend bien son sifflement quand même !
Autonomie
Pour une batterie de 500 Wh et sur un VTTAE de 22 kg, j’avoue qu’on est plutôt pas mal… En effet, pour un parcours assez technique en colline et sans y aller à l’économie, le moteur Ananda n’a pas été trop gourmand et, avec mes 70 kilos, j’ai pu effectuer pas loin de 50 km et un peu plus de 1 300 m de dénivelé positif. On n’est donc pas loin des performances d’un Fazua Ride 60, surtout si l’on tient compte du poids plus élevé du vélo par rapport à un Lapierre E-Zesty, un Santa Cruz Heckler SL ou un Haibike Lyke…
Points forts / faibles
Points forts
- Bloc moteur compact
- Douceur dans le passage des modes
- Commande simple et fonctionnelle
- Étagement des modes
- Autonomie
- Mode Boost efficace
- Capacité d’assistance dans le roulant
Points faibles
- Cadence de pédalage élevé pour obtenir l’assistance maxi
- Réponse de l’assistance trop molle en tout-terrain
- Sifflement du moteur un peu bruyant
- Capteur de pente inexistant
Qu’en penser ?
Dans le style assistance légère et efficace, l’Ananda MC230 eMTB se place plutôt bien. Et même si le poids du bloc moteur est assez élevé, dans l’esprit, on est proche d’un Fazua pour le couple et la puissance et pas loin d’un BH 2EXMAG dans la façon de diffuser l’assistance en douceur et de manière très (trop ?) progressive.
Bien sûr, j’ai relevé quelques petites erreurs de jeunesse, mais vu la réactivité du constructeur chinois et le succès de ses produits divers et variés sur le marché asiatique, il y a fort à parier que tout cela sera corrigé rapidement. Un sotfware plus adapté au tout-terrain technique et une application permettant de paramétrer précisément les modes d’assistance devraient gommer facilement tous ces petits défauts… Et à partir de là, Ananda disposerait de tous les moyens pour faire une entrée remarquée dans le monde du VTTAE sportif. A suivre…