Avant de rentrer dans le vif du sujet du Specialized Levo carbone, reprenons depuis le début… Tardivement entrée dans la bataille du VTT électrique, Specialized a finalement débarqué il y a près de deux ans avec des technologiques de rupture – en bonne firme californienne disruptive qui se respecte – pour tenter de bouleverser le marché du VTTAE haut de gamme.
Batterie intégrée, look proche d’un VTT classique, pneus plus, poste de pilotage épuré, application dédiée, cartographie personnalisable via son smartphone… Présenté à l’été 2015, livré début 2016, que l’on cautionne ou non certains parti pris, le Levo FSR a fait un carton. Disponible jusque-là uniquement en alu, il s’est largement implanté sur les sentiers et les randonnées.
Mais le marché du VTTAE n’attend pas. Menacé depuis, par la concurrence de mastodontes tels qu’Haibike ou Giant, des motorisations en perpétuel mouvement, pressé par l’audace d’un Lapierre ou la créativité du spécialiste Moustache en matière de VTTAE carbone (dès la rentrée 2016 !), l’arrivée récente de nouveaux challengers (BMC, Mondraker, Rocky Mountain…) , l’heure était venue pour le Levo de franchir un nouveau cap…
Temps de lecture estimé : 10 minutes / Photos : Quentin Chevat/VTTAE.fr
Le Levo passe à la fibre
Décliner le châssis très complexe du Levo actuel, à batterie intégrée démontable, n’est pas chose aisée. C’est bien plus compliqué qu’il n’y parait. De longs mois de développement et de modélisation du moule auront été nécessaires pour que l’équipe Specialized en charge du projet, basée en Suisse, aboutisse à un résultat entièrement satisfaisant.
Une nouvelle fois relayée à un rôle de “suiveur” dirons certains, mais sûre de son coup, Specialized lève enfin le voile sur le Turbo Levo FSR carbone.
“le carbone permet au Levo de “gratter” jusqu’à 500g sur le triangle avant”
Côté style, grâce au subtil mélange de fibres et de résine, le Levo se pare des lignes plébiscitées de la dernière itération du Stumpjumper FSR.
Le tout sublimé d’arêtes et reliefs pour minimiser le côté imposant du bloc moteur et de la batterie intégrée au tube diagonal. Le carénage moteur en plastique de la version alu est cette fois-ci directement moulé à l’ensemble du châssis. Le support moteur forgé a été repensé, allégé et optimisé pour ventiler au mieux le moteur.
Esthétique, le carbone a également des qualités dynamiques qui permettent au nouveau Levo de gagner 20% de rigidité globale, et 40% de rigidité latérale supplémentaire rien que sur le triangle arrière lorsqu’il est en carbone.
Sur le peson, le carbone permet au Levo de “gratter” jusqu’à 500g sur le triangle avant et d’économiser 150g supplémentaires sur le triangle arrière (version S-Works uniquement). Du Comp à l’Expert carbone, Specialized emploie de la fibre FACT 9 tandis que le haut de gamme S-Works s’octroie le carbone FACT 11, plus léger et plus cher.
Du nouveau sous le capot
Specialized profite du lancement de la version carbone pour introduire sa nouvelle motorisation, baptisée Turbo 1.3. Une nouveauté qui équipe tous les Levo FSR, alu comme carbone. Côté batterie pas de changement si ce n’est la généralisation de la version 504Wh sur tous les modèles Levo FSR (hors ST 29 pouces).
“15% de puissance supplémentaire grâce à un courant moteur en hausse”
Difficilement perceptible de l’extérieur, ce moteur (Brose) évolue pourtant de fond en comble. Du hardware (nouveaux aimants moteur) au software (nouvelle cartographie). Ces évolutions permettent au moteur de développer 15% de puissance supplémentaire grâce à un courant moteur en hausse.
De fins tampons polymérisés thermiques, placés à l’intérieur du moteur, sont chargés de répartir la chaleur, tandis que qu’un patch supplémentaire entre le moteur et le cadre dissipe la chaleur en excès.
La nouvelle cartographie reprend quant à elle les évolutions introduites lors de la mise à jour (Turbo 1.2) de l’hiver dernier, et va encore plus loin. Le logiciel interne progresse en terme de réactivité et de progressivité de l’assistance en fonction de la cadence et et de la force exercée.
Via la mise à jour de l’application Mission Control et sa fonction “Infinite Tune”, l’utilisateur peut dorénavant gérer tous les aspects de la puissance moteur : pourcentage d’assistance et courant moteur maxi. Commun à tous les modes par le passé, le courant moteur maximal peut être maintenant personnalisé indépendamment sur chaque mode. Bonne nouvelle pour les fans de Levo de la première heure, cette reprogrammation est compatible avec le Levo actuel.
Nouvelle commande et mode piéton
Last but not least concernant la motorisation, Specialized dégaine une nouvelle commande au guidon. Fini la disgracieuse commande Garmin disponible en accessoire, la marque équipe la famille Levo de série du même dispositif au guidon qui équipait déjà le modèle urbain Vado.
Réduite à sa plus simple expression, cette commande permet de monter/descendre un mode avec les boutons +/-, actionner un nouveau mode piéton (jusqu’à 6km/h) en maintenant le bouton sous la commande, ainsi que d’activer le mode Turbo instantanément.
En appuyant sur un bouton positionné au dessus de la commande, ce fonction “coup de boost” permet de passer d’Eco à Turbo et de franchir un obstacle ou un coup de cul que l’on n’a pas forcément anticipé ; une alternative au changement de rapport.
Le châssis évolue, le moteur aussi, et ce n’est pas tout…
L’EVOlution logique
Compatible 29 pouces et 27+ grâce à son dimensionnement Boost, le Levo (alu comme carbone) fait désormais l’impasse sur les boudins en 3.0. Specialized généralise la monte de ses récents pneus Butcher Grid Gripton en 2.8.
Chaussés sur des jantes larges en 38mm, ces pneus offrent un profil plus adapté à la pratique All Mountain, ainsi qu’un pilotage plus franc et précis.
“avec cette nouvelle génération, la marque n’a pas du tout cherché à radicaliser le Levo”
Pour compenser la hauteur de boite de pédalier (qui s’abaisse de 7mm) inhérente à ce nouveau choix pneumatique, le Levo adopte une fourche en 150mm de débattement pour accompagner les 135mm de l’arrière.
A ce propos, en lieu et place de Fox, c’est désormais RockShox qui équipe la gamme Levo d’amortisseurs Monarch RT/RT3 RX Trail Tune avec Autosag ; seule la version S-Works reçoit du Öhlins.
A quelques variations prés, dues essentiellement au centimètre supplémentaire de la proue et au vélo qui se projette vers l’arrière, la géométrie du Levo carbone est identique à celle de son prédécesseur en métal.
On note légèrement plus de chasse (66,1°), un empattement qui gagne 3 à 4 millimètres (1215mm en taille L), ainsi qu’une allonge (“reach”) légèrement raccourcie. CQFD, avec cette nouvelle génération, la marque n’a pas du tout cherché à radicaliser le Levo. Tiens tiens et pourquoi donc ?! Réponse à suivre au prochain épisode, à la rentrée sur VTTAE.fr 😉
La gamme Levo FSR 2018
Du plus onéreux au moins cher, le Levo FSR 2018 se décline en 7 versions masculines complétées de deux modèles féminins.
Avec le passage au châssis carbone et un équipement généralement en hausse, on constate une augmentation tarifaire de 11 à 12%.
Cliquez sur la galerie pour afficher les détails de chaque montage…
Levo FSR S-Works carbone – 9999 euros
Levo FSR Expert carbone – 7299 euros
Levo FSR Comp carbone – 5999 euros
Levo FSR Comp alu – 5199 euros
Levo FSR alu – 4199 euros
Levo FSR ST (120mm) Comp alu 29 pouces – 5199 euros
Levo FSR ST (120mm) alu 29 pouces – 4199 euros
Levo FSR femme Comp alu – 5199 euros
Levo FSR femme ST (120mm) alu 29 pouces – 4199 euros
Les Levo FSR alu sont d’ores et déjà disponibles dans le commerce tandis que les versions carbones (4 tailles, du S au XL) le seront courant août.
Quant à la gamme Levo HT semi-rigide, elle reste inchangée mais reçoit de série la mis à jour moteur Turbo 1.2.
Specialized Levo carbone – Prise en main
Début juin, la Rédaction VTTAE.fr/Endurotribe a été conviée à Vernon (New Jersey), à une heure et demie au Nord de New York, pour découvrir et tester toutes les nouveautés Specialized. Du VTT classique et de l’électrique au menu, et parmi ces nouveautés : le Levo carbone.
C’est à l’issue de deux journées sur les tracés variés du bike-park de Mountain Creek, parsemés de blocs de granite, que l’on vous livre nos premières impressions terrain. Essayé en versions Comp carbone, Expert carbone complétés d’une courte session au guidon du S-Works, voila ce que nous pouvons dire du Levo Carbone…
Le style
Style épuré, dans la continuité de l’alu, avec le raffinement supplémentaire du Stumpjumper, le Levo Carbone est (avec le Rocky PowerPlay, qui n’a pas de batterie amovible…) l’uns des très rares VTTAE à conserver la ligne d’un VTT classique. Ça de l’importance pour certains, pas pour d’autres. Ligne, finition, intégration… On trouve l’exercice très réussi même si le moteur pourrait gagner en compacité.
Evolution de la motorisation
Réputée pour son silence à l’usage et l’absence de friction au pédalage, le Levo l’est aussi pour ses à-coups. Souligné à l’occasion de notre match Haibike/Specialized sous la barre des 4000 euros, le Levo alu n’appréciait guère le pédalage saccadé. L’assistance avait tendance à couper, et repartir avec un petit temps de décalage lorsque l’on arrête un temps de pédaler. Le nouveau logiciel rectifie le tir, c’est de l’histoire ancienne. Réglé de série (sans appli), nous avons eu du mal à percevoir le réel gain de puissance. En revanche, le Levo progresse en réactivité et délivre sur chaque mode une assistance très progressive et naturelle, et sans à-coups !
Pour les plus pointus et les compétiteurs, l’Infinite Tune (et son réglage de courant moteur indépendant) permet vraiment aujourd’hui de se concocter des modes d’assistance à la carte et très différents, à la façon des modes de conduite d’une supercar.
La commande au guidon plutôt basique remplit parfaitement sa mission, le toucher des boutons est franc, l’ergonomie bien pensée. Afin de convenir au plus grand nombre, elle mériterait d’intégrer un jeu de LED pour indiquer le mode enclenché.
Intérêt du carbone et des évolutions sur le terrain
Sans un test comparatif avec une version alu dans les même conditions, difficile de tirer de grandes conclusions. Ce nouveau Levo semble plus précis oui, plus rigide en latéral certainement, mais pas vraiment plus léger à l’usage en versions Comp/Expert. Même s’il économise quelques centaines de grammes sur la balance, sa construction avec sa longue batterie ne permet pas de faire des miracles sur la direction. Plutôt bon pour un VTTAE dans l’exercice du bunny-up ou du manual, le Levo ne progresse pas vraiment.
La version full carbone S-Works se démarque nettement sur le terrain en terme de dynamisme et de vivacité. Les Traverse SL carbones y sont pour beaucoup, mais la fibre haut de gamme aussi.
Avec un centimètre supplémentaire à l’avant, le Levo demande un peu plus de rigueur de réglage de la position et du SAG pour garder une position efficace au pédalage ; sans quoi le tube de selle un peu couché vous embarque vers l’arrière.
Enfin, avec ses nouveaux pneus en 2.8, le Levo gagne en précision, en engagement aussi mais perd en confort. Moins flou mais aussi moins souple frontalement.
Des détails qui font la différence
On conclut cette prise en main avec une sélection de spécifications qui ont retenu notre attention.
Des modèles les moins chers jusqu’au Comp carbone, Specialized fait usage d’un très malin shifter GX bridé. La marque a insisté auprès de SRAM pour obtenir l’exclusivité d’une commande qui n’autorise qu’un passage de rapport à la fois. Pour les moins initiés d’entre-nous, cela permet de ne pas maltraiter la transmission en passant des rapports à la volée.
Sur l’Expert carbone, on retrouve une fourche Öhlins RFX 36 simplifiée, qui se passe de réglage de compression haute vitesse. Sans avoir les moyens de rouler en S-Works, on goutte à la qualité suédoise et au fonctionnement de la fourche (une fois bien réglée) un ton au dessus de la concurrence.
Sur cette même finition, on retrouve des roues carbones hybrides de bonne facture, avec profil de jantes Traverse SL couplé à des moyeux Specialized Stout. A ce niveau de prix, on est en droit d’attendre des roues en carbone ; là c’est le cas.
La version S-Works reçoit un tout nouvel ensemble SWAT, intégré à la colonne de direction. Le multi-outil se libère par le haut de la potence en faisant coulisser le capot, tandis que le dérive-chaîne est accessible sous le té de fourche.
On vous attend en commentaires pour échanger 😉