Oui, c’est bien ça ! On écrivait il y a peu, en présentation du BH Atom-X Carbon, qu’il peut être intéressant de concevoir un vélo en aluminium avant de le concevoir en carbone… Mais voici l’extrême inverse, avec la déclinaison aluminium du déjà connu BMC Speedfox AMP jusqu’ici en carbone.
Mais alors, pourquoi cette démarche opposée ? On s’est intéressé en détail à la réalisation des deux versions du BMC Speedfox AMP pour en savoir plus… Et on en a profité pour rouler les deux, et toucher du doigt, à l’usage, les différences. Alors ?!
Temps de lecture estimé : 7 minutes – Photos : Ruppert Fowler / Luigi Sestili & BMC
Au sommaire de cet article :
- Le monde n’est pas si cartésien…
- Du pain sur la planche…
- Déclinaison alu
- Conséquence heureuse
- Prise en main
- Une question de rendu
- C’est fin…
Le monde n’est pas si cartésien…
[dropcap size=big]C[/dropcap]oncevoir un vélo et le décliner, c’est un peu comme gravir une montagne : il n’y a pas nécessairement qu’un chemin pour arriver au sommet. Il y a nécessairement plusieurs versants, plusieurs lignes, plusieurs itinéraires qui ont chacun leurs intérêts, à choisir en fonction des circonstances du moment. C’est d’ailleurs souvent ce choix qui garantit finalement le succès de l’opération.
Ici, il faut se replonger dans l’historique du BMC Speedfox AMP pour en saisir les subtilités intéressantes. Ce vélo partage les mêmes concepts que le BMC Trailfox AMP que l’on présentait sur VTTAE.fr à son arrivée sur le marché. C’est notamment du côté du tube oblique, emblématique, qu’il faut se pencher.
C’est ici que l’usage du carbone, face à celui de l’aluminium, constitue une certaine facilité. Et même si réaliser des moules en carbone onéreux constitue un risque s’il faut ajuster le tir, le rapport poids/rigidité/solidité de la fibre est un avantage… Ici, sortir un vélo au poids et au comportement maîtrisé, quitte à ce que le tarif soit élevé au départ.
Du pain sur la planche…
Pour autant, les BMC Speedfox et Trailfox AMP ont souvent été questionnés sur ce dernier point : à plus de 6000€ le premier prix, tout le monde pouvait espérer un jour voir sortir une version plus abordable. Encore fallait-il identifier sur quel point faire l’économie… C’est là que le match carbone vs alu reprend de plus belle.
Dans un cadre en carbone, il peut y avoir jusqu’à 400 éléments placés les uns sur les autres au sein des moules, avant cuisson. Un travail que seules des mains expertes peuvent effectuer et donc, un coût de production non négligeable… Là où la production en aluminium, bien plus automatisable, permet un gain important. Encore faut-il résoudre certaines problématiques nouvelles..!
Ici, c’est le concept de tube périmétrique qui attire l’attention. En aluminium, sa production demande l’usage d’extrusion et implique, de toute façon, un poids final très important. Trop aux yeux de la marque. Il faut donc le mettre de côté, mais respecter le cahier des charges très clair en matière de rigidité : l’objectif est d’être aussi proche possible des valeurs de la version en carbone.
Déclinaison alu
Même ligne, même rigidité, poids contenu mais matériaux différents… Le défi n’est pas une mince affaire et prendra plus de temps que prévu au bureau d’étude pour aboutir à une solution viable. Un travail trois fois plus long, en réalité. En quoi consiste-t-il au final ?
Une fois mis en forme, le tube est usiné/grugé afin d’ouvrir l’accès batterie et préparer les zones de soudures qui doivent le raccorder au reste du cadre. Une solution élégante qui fait donc usage d’un tube aux qualités proches de la forge, et sans abus de long filets de soudure… Ce qui justifie qu’au final, les rigidités alu vs carbone soient proches au banc d’essai. Sur la balance, le cadre en aluminium pèse 500g de plus que son homologue en carbone et reprend les codes esthétiques que l’on connait à son homologue à fibre noire…
Conséquence heureuse
À la gamme de la marque suisse, apparaissent donc désormais les BMC Speedfox AMP Four & Five qui bénéficient de ce travail. À la caisse, ces deux modèles permettent désormais de rouler sur un BMC pour 2000€ de moins, le BMC Speedfox AMP Five débutant à 4299€, le Four à 4999€.
En matière d’équipement, le Three (premier prix carbone) et le Four (haut de gamme alu) font quasi appel aux mêmes niveaux de gamme. Le Five, lui, instaurant un niveau au dessous pour s’offrir au plus grand nombre.
Au final, la principale différence d’équipement se situe au niveau de la motorisation : les modèles en carbone font usage du système Shimano E8000, là où les modèles alu utilisent le E7000, présenté par ailleurs dans nos colonnes.
Alu vs carbone ? Shimano E7000 vs E8000 ? Quelles véritables différences au final ?! On a mis une après midi à profit, le temps d’une prise en main, pour en savoir plus…
Prise en main
Au programme, une même boucle d’une heure, sur les hauteurs rocailleuses et résolument All Mountain de Massa Maritima (ITA) : une première fois au guidon du BMC Speedfox AMP carbone, puis à celui du BMC Speedfox AMP Alu. Pour l’occasion, je roulais les vélos à l’aveugle, sans avoir déjà pris connaissance des objectifs de rigidité et de poids entre les deux versions…
J’ai d’ailleurs été conforté en apprenant que la marque visait les mêmes valeurs de rigidité et qu’il y a un écart de 500g final sur la balance… Parce qu’au roulage, je n’ai pas noté de différences de comportement importantes imputable à l’une, ou l’autre, de ces caractéristiques. J’aurais été sceptique si après coup, la marque m’avait indiqué vouloir marquer une différence sur ce terrain là.
Dans les deux cas, on retrouve plutôt ce tempérament posé, sain, équilibré mais pas nécessairement fou que l’on connait aux BMC à assistance électrique, et que j’ai déjà pu décrire à plusieurs reprises dans nos précédentes parutions. Pas de mauvaise surprise de ce côté là… Mais alors, où se situe la différence ?! Il y en a-t-il une ?! Sinon, qu’est-ce qui justifierait un tel écart d’investissement ?!
Une question de rendu
La véritable différence se fait finalement sur quatre points : le rendu du terrain, le dynamisme, la motorisation et cette fois-ci, l’amortisseur…
[toggler title=”Le rendu” ]
Entres les BMC Speedfox AMP alu et carbone, la différence se ressent d’abord au niveau du poste de pilotage. Pour peu que le terrain offre quelques aspérités – vaguelettes, cailloux incrustés, racines… – on ne les perçoit pas de la même manière entre les mains.
Le BMC Speedfox AMP alu a tendance à les filtrer, à en faire disparaître une partie, pour n’en restituer que l’essentiel. La version en carbone, elle, y est plus sensible, les retranscrit davantage. Il y a un léger rebond supplémentaire, les fréquences sont plus élevées, marquées.
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[toggler title=”Le dynamisme” ]
En parlant de rebond, la seconde différence se fait justement lorsqu’il s’agit de marquer un appui. En courbe par exemple. L’un comme l’autre se place de la même manière, et constitue un bon allier pour poser les roues où l’on a prévu…
C’est au moment de sortir de l’appui, d’enchaîner, que la différence se fait sentir. Le BMC Speedfox AMP alu prend comme le temps de marquer l’appui, d’y rester, avant de repartir. Le BMC Speedfox AMP Carbon, dans ces circonstances, repart et enchaîne une fraction de seconde plus rapidement.
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[toggler title=”La motorisation” ]
Mais alors, quel est l’ordre de grandeur de ces différences ? Est-ce contenu ou au contraire, significatif ?! Pour donner une idée, ces différences m’ont semblé moins prononcées que celles relevées entre les deux motorisations Shimano qui équipent les BMC Speedfox AMP alu et Carbone.
En quoi consistent-elles ? Il y a, peut-être, une légère différence de puissance, mais c’est surtout la manière avec laquelle elle est distribuée qui a retenu mon attention. Sur la Shimano E7000, la puissance arrive et coupe légèrement plus brutale que sur la Shimano E8000. Surtout, un léger temps de décalage, à la reprise comme à l’arrêt du pédalage, se fait sentir.
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[toggler title=”L’amortisseur” ]
Autre point de repère qui permet de quantifier : les deux vélos à ma disposition n’étaient pas équipés du même amortisseur. RockShox pour l’un, Fox pour l’autre… Et c’est presque ça qui a pris le pas sur les autres ressentis. Du moins, la différence entre l’un et l’autre m’a paru plus évidente et marquée que pour les autres points évoqués ici.
En l’occurrence, le RockShox Monarch a tendance à s’opposer un peu plus au déclenchement, avant de prendre le débattement, voir, parfois, de faire osciller le vélo. Il peut demande à s’appliquer sur les réglages… Là où le Fox, sur les mêmes réglages de base utilisés pour cette prise en main, est plus réactif et donc, donne davantage l’impression d’un tapis volant.
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C’est fin…
Voilà pour les impressions à l’issue de cette prise en main. Alors, qu’en penser ?! D’une part, le travail effectué est intéressant et mérite d’être valorisé. Notamment parce que sur le terrain, il démontre qu’on peut faire de belles choses en aluminium et qu’un travail supplémentaire de développement sur un vélo existant permet de le rendre plus accessible. En la matière, mission réussie. Le BMC Speedfox AMP Alu est loin de trahir ses prédécesseurs en carbone et livre une prestation à la hauteur de ce que l’on peut attendre.
Maintenant, la question se pose davantage à l’inverse : est-ce que ce nouveau venu ne fera pas de l’ombre aux coûteux modèles en carbone ?! Tout dépend des moyens que l’on souhaite allouer à sa pratique, et de la valeur que l’on peut accorder aux différences rapportées le plus précisément possible ici. Et à ce petit jeu là, j’ai le sentiment qu’il y a certainement autant de réponses qu’il y a d’intéressés. D’où le titre de ce dernier paragraphe… C’est fin !